La période de crise que nous traversons met au premier plan une ressource fondamentale pour la santé et la prospérité des personnes, des entreprises comme des sociétés : la confiance. Ce terme qui nous est cher, à Marc et moi-même, revient à de multiples reprises dans la presse et les conversations du moment. On interroge par sondage les chefs d’entreprise, pythies contemporaines, pour tester leur « confiance » dans l’avenir. On parle à tort et à travers de « crise de confiance » envers le gouvernement bien sûr, mais aussi les institutions, les médias… La confiance apparaît ainsi comme un éther en suspension, traversé de signes et de nuages plus ou moins volatiles. Or nous avons la chance de baigner au quotidien, dans nos démocraties, dans un océan de confiance passive : en tant qu’entrepreneurs, nous avons confiance dans notre banquier, notre expert-comptable, notre assureur, même s’il nous arrive de râler contre eux. En tant que particuliers, nous avons globalement confiance dans les entreprises qui ont construit nos routes, dans le constructeur auprès de qui nous avons acheté ou nous louons notre véhicule, dans les prévisions météorologiques et même dans l’administration fiscale. Nous accordons cette confiance « passive », au sens où nous ne la remettons pas en question tous les matins, à des décideurs et des producteurs que nous ne rencontrerons peut-être jamais. Pour ce qui touche de plus près à notre santé, et donc à notre expérience corporelle, nous sommes plus vigilants et attentifs, autant que possible, à connaître le producteur des aliments que nous consommons – ce qui explique le succès des « circuits courts » – et à avoir des garanties sur le médecin qui nous suit, via notre propre jugement et des recommandations.
Pourtant, cette confiance générale et fluctuante, qui rime avec le confort de nos démocraties, est-elle la confiance nécessaire et suffisante pour mener une entreprise, ses salariés et son écosystème dans la crise, pour booster son développement, pour nourrir son épanouissement humain, pour accélérer sa vitesse d’innovation, pour accroître son utilité et incarner pleinement sa raison d’être ? Certainement pas, car il existe en fait deux types de confiance: la confiance « passive », que les anglophones reconnaîtront sous le vocable « Confidence » et la confiance « active », que nos amis anglo-saxons désignent sous le nom de « Trust« . La confiance active, c’est le pari conscient et dynamique que nous faisons sur l’Autre : notre collaborateur, notre boss, notre collègue, notre client (eh oui) ou notre partenaire. Cette « confiance en action » est requise dès lors que nous nous ENGAGEONS AVEC D’AUTRES dans des initiatives, des projets, ou, comme c’est souvent le cas en ce moment, dans des actions palliatives en réponse à une crise, qui mobilisent un mélange de pragmatisme et de créativité collectifs.
C’est sur cette confiance en action que Marc et moi sommes amenés à travailler avec les leaders de confiance qui souhaitent atteindre, avec leurs équipes et partenaires, de hauts niveaux de performance dans tous les compartiments du jeu. La question qui reflète le mieux la culture de la confiance en action est celle-ci : « EST-CE QUE JE PEUX COMPTER SUR TOI ? ». Toute la dynamique d’évolution vers une culture de « Totale Confiance » repose sur la mise en œuvre d’une fluidité et d’une qualité exceptionnelles des interactions au sein d’un écosystème (entreprise, territoire…), telles que chaque membre puisse répondre positivement et en connaissance de cause à cette question. Naturellement, cette confiance en action, dont nous verrons à l’occasion des articles à venir qu’elle est d’essence biologique, nourrit la confiance générale évoquée plus haut. Car chaque collaborateur, au-delà de la confiance de base qu’il accorde à son manager, se posera la question « Est-ce que je peux compter sur lui? » en cas de défi innovant qui requiert un soutien particulier ; chaque patient, au-delà de la confiance de base qu’il accorde à son médecin, se posera la question : « Est-ce que je peux compter sur lui? » s’il tombe gravement malade ; chaque citoyen sera en droit de poser la question au gouvernement et en particulier au Président de la République, qui a pris le leadership de la gestion de la crise sanitaire comme Napoléon a saisi le drapeau au Pont d’Arcole : « Est-ce que je peux compter sur vous ? ». On comprend que cette question appelle réponse en mots et en actes et que, plus la distance est grande entre les citoyens, les élus et les représentants locaux de ces élus, plus le feedback, moteur de la confiance en action, est difficile, voire inexistant, et donc plus la réserve de confiance s’amenuise. Les entreprises à taille humaine, TPEs, PMEs, ETIs, mais aussi grandes entreprises en réseaux décentralisés, ont beaucoup plus de chances que les institutions et entreprises verticales à X niveaux hiérarchiques de générer et faire circuler la confiance, sève du développement économique et humain, en leur sein, mais aussi dans leur écosystème territorial de proximité (partenaires, fournisseurs, milieu associatif, élus…). Je vois dans cette confiance en action de proximité une des sources de l’innovation née des territoires, chère à l’économiste Michel GODET, créateur du Prix des Bonnes Nouvelles des Territoires.
« Est-ce que je peux compter sur toi ? ». C’est le premier des deux leitmotivs (il y en a un autre, qui apparaîtra plus tard dans ce blog) qui fondent la confiance en action dans les relations humaines, dans les entreprises et dans toute organisation ou institution.
Christian MAYEUR – © MAYEUR ZARROUK